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Répartition des réfugiés à Marseille en 1853
Titre : Répartition des réfugiés à Marseille en 1853
Source : Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 4M956
Auteur de la notice : Delphine Diaz
Auteur de la carte : Hugo Vermeren
Date de publication de la notice : 22/09/2017
Marseille a été au cours du long xixe siècle une destination et un lieu de résidence privilégiés pour les réfugiés étrangers amenés à traverser la France ou à y séjourner. Au cours de la première moitié du siècle, Marseille a connu une forte croissance démographique (taux moyen : 2% par an entre 1820 et 1846), devenant également à cette période le premier port français, en passant devant Bordeaux. Sous la Restauration, Marseille a constitué le premier port de débarquement pour les migrants d’origine grecque et italienne qui avaient fui leur pays pour des motifs politiques. À partir de sources religieuses et consulaires, Pierre Échinard estimait ainsi à 400 personnes le nombre d’exilés grecs établis dans la ville au début de la monarchie de Juillet. Même si les réfugiés venus du sud de l’Europe, comme les Grecs, les Espagnols ou les Italiens, ont été les plus nombreux à passer par Marseille sous le régime de Louis-Philippe, la ville portuaire a également accueilli des exilés d’autres origines (en particulier les Polonais emprisonnés dans l’Empire d’Autriche et envoyés depuis les ports de la mer Adriatique vers les côtes françaises).
Lieu de débarquement et de passage des réfugiés venus de toute l’Europe, Marseille était néanmoins observée avec attention par les gouvernements successifs de la monarchie de Juillet. Le 19 mars 1833, l’instruction du ministère de l’Intérieur adoptée après la première loi sur les « étrangers réfugiés » d’avril 1832, a fait du réfugié une persona non grata dans plusieurs grandes agglomérations du royaume, parmi lesquelles se trouvait Marseille. Si ces règles avaient été dans un premier temps assouplies au début de la Seconde République, elles ont été réactivées après le tournant conservateur du régime et au début du Second Empire. En avril 1853, une circulaire du ministère de la Police générale confirmait l’application de « certaines règles élémentaires[1] » dont l’administration ne devait jamais s’écarter dans sa gestion des réfugiés secourus. Parmi ces règles, on comptait au premier chef l’interdiction pour eux de se rendre ou de résider à Paris, Lyon et Marseille, à moins d’une autorisation ministérielle spéciale. Pourtant, au début du Second Empire, Marseille demeurait encore le lieu de séjour de nombreux réfugiés auxquels des secours du ministère de l’Intérieur continuaient d’être distribués sur dérogation. [1] Archives départementales de la Vienne, 4 M 166, circulaire du ministère de la Police générale aux préfets, 9 avril 1853.
Lieu de débarquement et de passage des réfugiés venus de toute l’Europe, Marseille était néanmoins observée avec attention par les gouvernements successifs de la monarchie de Juillet. Le 19 mars 1833, l’instruction du ministère de l’Intérieur adoptée après la première loi sur les « étrangers réfugiés » d’avril 1832, a fait du réfugié une persona non grata dans plusieurs grandes agglomérations du royaume, parmi lesquelles se trouvait Marseille. Si ces règles avaient été dans un premier temps assouplies au début de la Seconde République, elles ont été réactivées après le tournant conservateur du régime et au début du Second Empire. En avril 1853, une circulaire du ministère de la Police générale confirmait l’application de « certaines règles élémentaires[1] » dont l’administration ne devait jamais s’écarter dans sa gestion des réfugiés secourus. Parmi ces règles, on comptait au premier chef l’interdiction pour eux de se rendre ou de résider à Paris, Lyon et Marseille, à moins d’une autorisation ministérielle spéciale. Pourtant, au début du Second Empire, Marseille demeurait encore le lieu de séjour de nombreux réfugiés auxquels des secours du ministère de l’Intérieur continuaient d’être distribués sur dérogation. [1] Archives départementales de la Vienne, 4 M 166, circulaire du ministère de la Police générale aux préfets, 9 avril 1853.
La carte de répartition des réfugiés étrangers dans la ville de Marseille en 1853 a pu être élaborée grâce à des registres nominatifs conservés aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône. Datant du 14 janvier 1853, ces registres qui contiennent les adresses des réfugiés autorisés à vivre à Marseille permettent de saisir la grande diversité des origines nationales représentées parmi ces étrangers, ainsi que leur répartition dans l’espace urbain. Au total, leur nombre dépassait alors les 250 personnes, et parmi elles prédominaient les Espagnols (59%), formés essentiellement de réfugiés légitimistes, d’opinion carliste, mais aussi d’hommes engagés du côté du libéralisme progressiste[1], suivis ensuite des Italiens (31%).
Sans surprise, le quartier central du Vieux-Port et de la Canebière est celui qui polarisait le plus la présence de ces étrangers – Lombards, Vénitiens, Toscans, Romains, Calabrais, Napolitains, mais aussi Espagnols, Polonais et Hongrois. Des réfugiés se fixaient également dans des quartiers plus périphériques, tels que les environs du port de la Joliette pour les Espagnols, ou la place Castellane et ses alentours pour les Napolitains et les Espagnols. Les adresses indiquées par les réfugiés étaient souvent des lieux d’hébergement collectifs, qu’il s’agisse de maisons louées à plusieurs ou, le plus souvent, d’hôtels garnis. Six réfugiés originaires du Royaume des Deux-Siciles indiquent ainsi tous résider 2, rue Sainte, sur la rive sud du Vieux Port, un exemple parmi bien d’autres qui suggèrent combien les logiques de regroupement spatial des réfugiés s’effectuaient en fonction de leurs origines nationales et régionales. [1] Les réfugiés carlistes constituent 86% des Espagnols en résidence à Marseille, contre seulement 14% environ de réfugiés qualifiés de « progressistes » dans le registre nominatif.
Sans surprise, le quartier central du Vieux-Port et de la Canebière est celui qui polarisait le plus la présence de ces étrangers – Lombards, Vénitiens, Toscans, Romains, Calabrais, Napolitains, mais aussi Espagnols, Polonais et Hongrois. Des réfugiés se fixaient également dans des quartiers plus périphériques, tels que les environs du port de la Joliette pour les Espagnols, ou la place Castellane et ses alentours pour les Napolitains et les Espagnols. Les adresses indiquées par les réfugiés étaient souvent des lieux d’hébergement collectifs, qu’il s’agisse de maisons louées à plusieurs ou, le plus souvent, d’hôtels garnis. Six réfugiés originaires du Royaume des Deux-Siciles indiquent ainsi tous résider 2, rue Sainte, sur la rive sud du Vieux Port, un exemple parmi bien d’autres qui suggèrent combien les logiques de regroupement spatial des réfugiés s’effectuaient en fonction de leurs origines nationales et régionales. [1] Les réfugiés carlistes constituent 86% des Espagnols en résidence à Marseille, contre seulement 14% environ de réfugiés qualifiés de « progressistes » dans le registre nominatif.
Renée Lopez, Émile Témime, Migrance. Histoire des migrations à Marseille, Aix-en-Provence, Edisud, 1990, t. 2.
Stéphane Mourlane et Céline Régnard, Les Batailles de Marseille : immigration, violences et conflits, XIXe-XXe siècles, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2013.
Éliane Richard-Jalabert, « Marseille, ville refuge pour les libéraux espagnols, 1825-1848 », Annales du midi, vol. 72, fasc. 3, n° 51, 1960, p. 309-323.
Stéphane Mourlane et Céline Régnard, Les Batailles de Marseille : immigration, violences et conflits, XIXe-XXe siècles, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2013.
Éliane Richard-Jalabert, « Marseille, ville refuge pour les libéraux espagnols, 1825-1848 », Annales du midi, vol. 72, fasc. 3, n° 51, 1960, p. 309-323.