Cartothèque
Itinéraires de l'exil
Mobilisation politique en exil : ambassades clandestines de l’Hôtel Lambert à travers l’Europe
Cette carte montre le maillage territorial couvert par le réseau de l’Hôtel Lambert. Afin d’assurer la continuité des relations diplomatiques de la faction aristocratique polonaise avec la Grande-Bretagne, deuxième pays d’accueil des exilés polonais, le neveu de Czartoryski, le général Władysław Zamoyski (1803-1868), effectue des missions ponctuelles à Londres dans les années 1830-1848. Zamoyski assure la représentation de l’Hôtel Lambert auprès des hommes d’État britanniques, défend le statut du Royaume de Pologne garanti par les articles du Congrès de Vienne et se fait le porte-voix de la propagande antirusse.
Dès l’échec de l’insurrection de Novembre, le deuxième objectif du gouvernement en exil du prince Czartoryski consiste à établir des relations avec le pape Grégoire XVI (1831-1846) qui prend officiellement parti contre les insurgés dans l’encyclique Cum Primum (1832). À partir de 1833, les objectifs sont d’éclairer le pape sur les persécutions infligées par les autorités russes aux catholiques polonais, d’affaiblir l’influence tsariste à Rome et d’obtenir l’appui du pape en faveur de la cause nationale polonaise. Après plusieurs tentatives pour fonder une agence polonaise à Rome, une structure permanente de l’Hôtel Lambert y est finalement établie à la fin des années 1830. Elle connaît une intense activité, entre 1844 et 1848, sous l’impulsion de son responsable Ludwik Orpiszewski (1810-1875).
Enfin, une agence pérenne est implantée dans l’Empire ottoman à la fin de l’année 1841. Le prince Czartoryski mandate à Constantinople Michał Czaykowski (1804-1886), ancien insurgé et romancier. Grâce à son talent diplomatique, ce dernier établit des relations avec les représentants français dans l’Empire ottoman et les hommes d’État ottomans dans le but de diminuer l’ingérence russe dans les Balkans et d’obtenir une position d’intermédiaire entre les populations slaves et les autorités ottomanes. Sous l’impulsion du prince Czartoryski et de Czaykowski, des cellules permanentes s’ouvrent à Belgrade et à Tulcea, tandis que des agences temporaires sont créées à Bucarest, Iaşi, Zagreb et Dubrovnik où elles fonctionnent dans les années 1840.
Après la conversion à l’islam de Czaykowski en 1850, l’Agence polonaise à Constantinople est fermée temporairement entre 1852 et 1858. Le remplaçant de Czaykowski, Władysław Jordan (1819-1891), n’arrive pas, malgré ses efforts, à rétablir le prestige de la cellule polonaise. La mort du prince Adam Czartoryski en 1861 et la défaite de l’insurrection polonaise contre la Russie en 1863 mettent fin à l’existence des ambassades informelles de l’Hôtel Lambert.
Hahn Hans Henning, Dyplomacja bez listów uwierzytelniających [La diplomatie en exil d’Adam Jerzy Czartoryski 1830-1840], (1978), traduit de l’allemand en polonais par Maryla Borkowicz, Warszawa, Państwowe Wydawnictwo Naukowe, 1987.
Kalembka Sławomir, « Polskie zabiegi dyplomatyczne między powstaniem listopadowym a styczniowym (koniec 1831-1860) » [Les démarches diplomatiques polonaises entre l’Insurrection de Novembre et l’Insurrection de Janvier (fin 1831-1860)], dans : Ludwik Bazylow (éd.), Historia dyplomacji polskiej 1795-1918 [Histoire de la diplomatie polonaise 1795-1918], t. III, Warszawa, Państwowe Wydawnictwo Naukowe, 1982, p. 231-432.