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Les réfugiés du Numancia : les origines géographiques de 488 Espagnols en Algérie (1874)
Titre : Les réfugiés du Numancia : origines géographiques
Source : Archivo General de la Administración (AGA), Alcalá de Henares, 66/4123
Auteur de la notice : Jeanne Moisand
Auteur de la carte : Hugo Vermeren
Cette carte représente la province de naissance de 488 réfugiés espagnols en Algérie, internés par l’administration française peu après leur arrivée dans le port de Mers-el-Kebir en janvier 1874. Ils font partie d’un groupe plus nombreux, composé de 1 636 « cantonalistes » montés à bord du navire de guerre Numancia pour échapper à la répression de leur République autonome (« canton ») par l’armée espagnole. Les autorités françaises les internent dans des forts militaires et cherchent à différencier parmi eux les réfugiés politiques des criminels de droit commun. Ce travail administratif permet l’établissement de plusieurs listes, dont la plus détaillée concerne 488 réfugiés probablement internés à Arzew, auxquels on demande entre autres informations leur province de naissance.
La carte élaborée à partir de ces déclarations montre la grande dispersion des origines des Espagnols cantonalistes. Un peu moins d’un tiers de ces réfugiés qui apportent une réponse sur leur lieu de naissance (soit 436 réfugiés) affirment être nés dans les provinces les plus proches de Carthagène : Murcie (99), Almeria et Alicante (43).Les deux tiers restants se répartissent sur tout le territoire espagnol et plus loin encore : non représentés sur la carte, quatre individus sont nés dans les colonies (Cuba et Philippines) et trois à l’étranger (France, « Pologne » et « Amérique »). Alors que l’historiographie fait traditionnellement de la révolution cantonale un événement purement local, l’apport de forces externes à la province de Murcie s’avère considérable.
Les natifs des provinces littorales semblent les plus nombreux. Cela s’explique par l’implication de nombreux marins militaires dans l’insurrection, et par leur surévaluation probable parmi les réfugiés du Numancia (les autres catégories d’insurgés ayant probablement eu moins facilement accès au navire). Entre Pontevedra, La Corogne, Lugo, Oviedo, Santander et le Guipuzcoa, 65 d’entre eux (près de 15%) proviennent de la façade nord-atlantique de l’Espagne, pourtant très éloignée de Carthagène. Le littoral catalanophone, plus proche, pèse aussi d’un grand poids avec 26 natifs des Baléares, 18 du littoral catalan, 16 de la province de Castellón et 27 de celle de Valence, soit près d’un cinquième du total. De ces régions viennent non seulement certains marins insurgés, mais aussi les promoteurs d’autres cantons défaits par l’armée centraliste en août et repliés à Carthagène. L’Espagne intérieure apparaît en revanche moins représentée dans les origines des réfugiés : seuls ressortent Madrid, Saragosse, et certaines contrées andalouses elles aussi fortement travaillées par le cantonalisme. Les réfugiés du Numancia – défenseurs les plus jusqu’au-boutistes du canton de Carthagène – viennent donc de toute l’Espagne littorale et républicaine, même si la côte du Levant, de Valence à Almeria, paraît clairement la plus impliquée.
Vilar, Juan Bautista, La emigración española al Norte de Africa (1830-1999), Paris, Hachette, 1986
Moisand, Jeanne, Des Communes en Espagne. Révolutionnaires des deux mondes sous la Ire République espagnole, Mémoire inédit d’habilitation à diriger des recherches en cours.