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Itinéraires de l'exil
Itinéraire du Toscan Giorgio Libri-Bagnano (1780-1836)

Titre : Itinéraire du réfugié toscan Giorgio Libri-Bagnano (1780-1836)
Source : Archives Nationales, BB/3/103
Auteur de la notice : Hugo Vermeren
Auteur de la carte : Hugo Vermeren
Date de publication de la notice : 2017/06/15
Le parcours de Giorgio Libri-Bagnano (1780-1836), certes singulier, illustre l’intense mobilité des exilés politiques dans l’Europe du XIXe siècle. Il nous renseigne sur la position instable des réfugiés dans des sociétés d’accueil dont le contexte politique local était changeant et montre leur confrontation permanente avec les institutions administratives, policières et judiciaires.
Giorgio Libri, comte de Bagnano, est né à Florence en 1780 et décède à Amsterdam en 1836. Il appartenait à une riche et ancienne famille de l’aristocratie toscane, dont les importantes archives, restées longtemps dans le palais familial situé dans le centre historique de Florence, sont désormais conservées par la Bibliothèque Moreniana. Son fils, Guglielmo Libri (1803-1869), professeur de mathématiques à l’Université de Pise, proche de Giuseppe Mazzini, a lui aussi quitté la Toscane et s’est réfugié à Marseille en 1830, obtenant la naturalisation française en 1833, puis une chaire au collège de France en 1839.
Cette carte montre le parcours d’exil et l’itinéraire carcéral de Giorgio Libri-Bagnano. En 1799, il a soutenu l’occupation française en Italie et s’est affiché comme un partisan de Napoléon Bonaparte. Il a alors levé deux régiments qu’il a menés à la seconde bataille de l’île d’Elbe, à Portoferraio, en 1801, où il a été blessé. Il a d’abord rejoint Massa Carrara puis Lucques avant de fuir les armées autrichiennes, en s’exilant à Toulouse en 1802.
Condamné par la justice française à dix années de travaux forcés en 1816 et à la prison à perpétuité en 1817 pour escroquerie et usages de faux en effet de commerce, il a été banni une première fois en 1817, peine qu’il refusa sous prétexte qu’elle est « la grâce pour un étranger coupable » alors qu’il se déclarait innocent. La justice lui reprocha également sa participation, à Sayat (Puy-de-Dôme) en 1814, à la « conspiration des toasts » au cours d’un banquet de notables ayant crié « vive l’empereur ». Libry-Bagnano a rédigé de nombreuses lettres adressées au roi de France dans lesquelles il disait refuser de quitter la France, clamait son innocence et dénonçait ses conditions d’incarcération. Transféré de prison en prison jusqu’à sa seconde expulsion vers la Belgique en 1825, il a connu un itinéraire carcéral complexe. Renvoyé vers les geôles du Mont-Saint-Michel par le tribunal de Colmar, il a finalement été dirigé vers la maison centrale de Clairvaux en 1823, puis emprisonné à la Conciergerie de Paris en 1824.
Arrivé à Bruxelles, il a fondé le quotidien Le National en 1828, organe de presse financé par le gouvernement du roi de Hollande Guillaume Ier. Présenté comme un « agent secret de Hollande » et un « journaliste ministériel », il incarnait par excellence la presse gouvernementale haïe des patriotes belges. Lors de la révolution du 25 août 1830, ses bureaux et son domicile bruxellois ont été pillés et brûlés par les insurgés. Giorgio Libri-Bagnano s’est alors réfugié à Amsterdam. Il y est décédé le 1er janvier 1836 dans une forme d’isolement et de retour à la religion, comme on peut le lire dans l’article que lui consacre la revue ecclésiastique et littéraire L’Ami de la religion en 1836.
Antheunis, L., « Een Florentijnsch avonturier in het dienst van Koning Willem der Nederlanden : Graaf Georges Libri-Bagnano. 1780-1836 », Bijdragen tot de geschiedenis, t. 29,10-12 1938, p. 245-289, t. 30, p. 1-36.
Van den Dungen, P., « Le rôle des milieux de presse dans la fondation de l’État belge et la création d’une « opinion publique » nationale (1830-1860) », Amnis, revue de civilisation contemporaine Europes/Amériqcues, n°4, 2004.
Van den Dungen, P., Milieux de presse et journalistes en Belgique au 19ème siècle (1828-1914). Des origines de l’État constitutionnel bourgeois aux débuts de la démocratie de masse, Thèse de doctorat, Bruxelles, ULB, 3 t., 2003.
Wargny de, A., Esquisses historiques de la révolution de Belgique de 1830, Bruxelles, H. Tarlier, 1830.